Macho-men, harcèlement, fake news et aliénation sociale. Pourquoi encore poster ses vidéos sur les réseaux sociaux malgré un contexte nauséabond ?
Bienvenue dans le eFar West. Un monde de eDécence et de eSubtilité où les opinions diverses et contradictoires se côtoient sereinement et où une attitude précautionneuse gouverne chaque choix, chaque discussion. Poisson d’avril ! Les réseaux sociaux avaient pour ambition de connecter les humains, ils ont plutôt exacerbé nos bas instincts et connecté nos anxiétés, c’est la grande dérive et pour beaucoup une violente désillusion. Pour les entreprises comme pour les particuliers, une question éthique s’impose : faut-il encore y être présent ? Ou faut-il tout bonnement s’en retirer ?
Même si la tentation est grande, cet article n’a pas pour vocation de diaboliser quoi que ce soit ou de jeter la pierre sur qui que ce soit. Il veut, factuellement et sans langue de bois, poser les vraies questions. Car entre les macho-men virilistes, la banalisation du harcèlement, la production industrielle de fake news (pardon, de “vérités alternatives”) et l’aliénation sociale, il est aujourd’hui temps de se demander dans quelle mesure ces espaces sont encore compatibles avec nos valeurs… et notre santé mentale.
Testostérone à outrance et contenus sous stéroïdes
Depuis plusieurs années, les plateformes en ligne sont devenues le terreau fertile d’une nouvelle vague de virilisme (très) agressif. On y voit fleurir et se déployer des discours sexistes, violents, explicitement misogynes et flirtant toujours de très près avec l’appel à la haine.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, ces contenus sont massivement relayés par les algorithmes. Non pas par erreur mais par pur cynisme, parce qu’ils génèrent du clic, du reach, de l’engagement et affichent un taux de conversion ha-llu-ci-nant (si, si, je te promets). Les plateformes n’ont aucun intérêt à modérer efficacement : le conflit fait vendre.
Sur les réseaux sociaux, le harcèlement est devenu systémique. Il ne touche plus seulement les figures publiques, tout le monde peut être la cible d’un doxing, de chantage (on pense aux “sextorsions” ou au revenge porn par exemple) ou simplement de messages haineux.
Les modérations sont largement automatisées, inefficaces et lentes. Les conséquences, elles, sont rapides et violentes. Une polémique suffit à entacher définitivement une réputation, voire à mettre en danger des individus. Et on ne compte plus les récits d’adolescents poussés à bout après la diffusion en ligne de vidéos privées. Ce ne sont malheureusement pas des cas isolés mais bien la sombre expression d’un système toxique et défaillant.
Pendant ce temps, les plateformes accumulent les vues et engrangent allégrement les profits.
Pour une entreprise, cette ambiance pose un problème (et c’est un euphémisme) : quelle image renvoyons-nous si nos contenus sont placés à côté de récits haineux ? Peut-on promouvoir des valeurs d’inclusion et de bienveillance tout en sponsorisant (même indirectement) un environnement d’une violence extrême ? La question devient bien sûr toujours plus brûlante dans un contexte où les entreprises essaient d’aligner leurs communications sur leurs valeurs éthiques.
Fake news, deepfakes et complotisme : la responsabilité des contenus vidéo sur les réseaux sociaux
Le modèle économique des réseaux sociaux repose sur la captation de l’attention. Comme l’exprimait déjà Patrick Le Lay en 2004 (à propos du fonctionnement de la chaîne de télévision française TF1 qu’il dirigeait), ce que ces plateformes vendent aux annonceurs, ce n’est ni plus ni moins que du “temps de cerveau humain disponible”. Et quoi de plus accrocheur qu’une information calomnieuse et outrancière diffusée au travers d’une vidéo, le format digital de loin le plus engageant et le plus addictif ? Les fake news, virales par essence, ont donc explosé ces dernières années. Les deepfakes (vidéos truquées par IA) débarquent massivement. Les discours complotistes prospèrent.
De Cambridge Analytica à la prolifération des médias de désinformation, ce ne sont pas les preuves qui manquent : les réseaux sont évidemment tout sauf neutres. Et puis leurs politiques peuvent changer du tout au tout d’un jour à l’autre, sans même parler des mises à jour incessantes des algorithmes dont une partie des règles est toujours maintenue secrète. Alors, en tant qu’entreprise, y construire une image de « marque de confiance » relève de la gageure. Et pourtant, l’efficacité de ces canaux pour atteindre une cible est encore inégalée. Au-delà de l’habitude, du réflexe, c’est bien sûr pour cette raison que nous y sommes encore massivement présents malgré le contexte nauséabond décrit ci-dessus !
Les réseaux sont pensés comme des machines à capturer notre attention. L’objectif n’est pas de nous informer ou de nous divertir, mais de nous retenir le plus longtemps possible dans le cachot de nos pulsions. On parle de captologie : la science de l’addiction numérique. Les études à charge s’accumulent : utilisation excessive des réseaux = perte de concentration, fatigue mentale, troubles du sommeil, sentiment de solitude accru. Pour les jeunes, c’est pire : anxiété, comparaison sociale néfaste, mal-être généralisé…
Mais malheureusement pour la plupart d’entre nous, se positionner clairement n’est pas si simple parce que les enjeux sont multiples et que le critère économique reste souvent l’argument primordial pour une entreprise. Logique. Alors, après avoir dressé ce sombre tableau, redevenons raisonnable et pragmatique : à quoi devez-vous penser pour vos contenus vidéos sur les réseaux sociaux en 2025 ?
Rentabilité, visibilité, mais à quel prix ?
Soyons honnêtes. La plupart des entreprises sont présentes sur les réseaux sociaux parce que la plupart des entreprises doivent être présentes sur les réseaux sociaux, c’est ce qu’on nous a tous dit alors on le fait. Mais qu’est-ce qu’on y fait, sérieusement ? Quels bénéfices en tire-t-on ? Comptes inactifs, pages LinkedIn vides, tweets sans engagement. On y est parce qu’il faut y être. Pas parce que cela nous apporte réellement quelque chose. Pour quels retours ? Un peu de portée organique, quelques likes, un soupçon d’engagement… et surtout beaucoup d’énergie dépensée.
Pour que vos communications vidéos sur les réseaux sociaux soient récompensées à la hauteur de vos investissements, il vous faut :
- Une stratégie pertinente par rapport à vos objectifs
- Un content calendar solide
- Un partenaire créatif (studio vidéo, agence de communication…) ou une équipe de création interne (rédaction, visuels, vidéo)
- Des formats adaptés plateforme par plateforme
- Une veille algorithmique constante
Un effort de temps important qui implique une construction stratégique bien définie. Toutefois, l’investissement de ces ressources devrait vous garantir des résultats probants. Après tout, ce n’est pas sans raison si ces canaux ont pris une place démesurée dans le paysage médiatique en seulement quelques années. L’efficacité des outils qu’ils proposent pour que vos communications atteignent leurs cibles n’est plus à prouver. Attention, gardez cependant en tête que le reach organique est souvent mineur (particulièrement sur les plateformes Meta qui ont changé leur fusil d’épaule après la crise du Covid-19). Si vous avez des objectifs de diffusion importants, il est donc très probable qu’il vous faudra mettre la main à la poche pour les atteindre.
Employer les réseaux sociaux à bon escient : prendre le temps de revenir à la stratégie
Une des problématiques malheureusement trop récurrentes à laquelle nous devons tous faire face : nous manquons cruellement de temps. Pourtant, c’est LA variable qui conditionne principalement la qualité de notre travail, et donc in fine la production de résultats. Et revenir à un rapport plus rationnel au temps est une question cruciale de notre époque, comme en témoigne par exemple la tendance du slow working. D’ailleurs, nous confondons encore souvent les notions d’efficacité, de performance et de qualité. Et dans des équipes rationnalisées à l’extrême toujours plus réduites, il est fatalement difficile de valoriser le temps long qui est toujours occulté par des objectifs à court-terme.
Pourtant, il est évident que prendre le temps nécessaire à la construction d’un plan cohérent et solide visant à remplir des objectifs marketing précis est le meilleur moyen d’atteindre le plus rapidement ses résultats. C’est ce qu’on appelle une stratégie. Pour en définir les prémices, le contour, vous devrez impérativement vous poser certaines questions. Et pour que les réponses à ces questions vous aiguillent dans la bonne direction, de nouveau il faudra prendre le temps.
Pourquoi voulez-vous produire une vidéo ?
Quels sont vos objectifs ? Quel effet souhaitez-vous qu’elle produise ?…
Ne vous arrêtez pas aux objectifs marketings de base : notoriété, engagement, acquisition de lead… Allez plus loin ! Plus vos objectifs seront spécifiques, plus leur réalisation paraîtra évidente. Alors restreignez et précisez le plus possible votre ciblage.
Quelle est votre cible ?
Quel public visez-vous ? Pour quelle raison ?…
Selon qui vous viserez, certains canaux de diffusion deviendront plus pertinents que d’autres en fonction des habitudes de consommation de vos prospects. Une fois que vous aurez défini une cible, vous définirez donc aussi un réseau idéal pour la publication de votre contenu ainsi qu’un format/un style de vidéo.
Quel est votre message ?
Comment voulez-vous qu’il soit perçu ? Quel est votre ton ?…
Quand vous aurez défini ces différents points en ayant pris le temps nécessaire pour les aborder sous tous les angles. Quand vous serez certains de la cohérence de cette stratégie par rapport à vos enjeux. Alors, il sera temps de produire le contenu qui vous permettra de transformer l’essai, et les résultats devraient largement être à la hauteur du temps investi. C’est en tout cas ce qu’on observe le plus souvent.
Stratégie de qualité = résultats en quantité
Pour aller plus loin -> 12 questions essentielles pour réussir votre stratégie de communication vidéo
Quelles alternatives ?
Selon que vous choisirez de tout bonnement quitter les réseaux sociaux ou de les désinvestir partiellement, un panel conséquent de solutions alternatives s’offre à vous.
- Mastodon, Peertube, Signal… ce sont toutes de « nouvelles » plateformes qui offrent des modèles décentralisés, à échelle humaine
- Les « anciennes » méthodes (qui parfois ne sont plus en odeur de sainteté depuis seulement quelques mois) : la newsletter, le blog, le référencement naturel… Ce sont toujours des piliers de communication solides qu’il ne faut négliger pour rien au monde
De nouveau, on en revient à une notion de gestion de la ressource temporelle. Multiplier les points de contact et les supports de communication est plus chronophage qu’utiliser une méthode unilatérale. Et puis ces outils doivent bien sûr s’inscrire dans une stratégie, une vision plus large pour produire des résultats intéressants. Mais ils permettent certainement de construire une audience engagée en misant plutôt sur la qualité, les contenus à haute valeur ajoutée, que sur la quantité.
Conclusion
Le plus souvent, la question que vous devrez vous poser ne sera pas tellement « faut-il continuer à être présent sur les réseaux sociaux ? », mais plutôt « comment encore s’y sentir aligné avec nos valeurs ? ».
En fonction de ses objectifs et de sa réalité spécifique, chaque entreprise devra choisir son chemin. Soit continuer à jouer selon les règles d’un jeu pipé mais diablement efficace. Soit en sortir, au risque de perdre en visibilité mais avec la satisfaction de ne plus participer à un système délétère. Soit opter pour la voie du milieu avec un désengagement partiel, un subtil équilibre entre statu quo et responsabilité sociétale et éthique.
C’est un choix stratégique. Mais aussi un acte moral et politique.
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